Le désengagement plutôt que la déradicalisation
Le Plan national de prévention de la radicalisation (PNPR) adopté le 23 février 2018 prévoit la prévention de la radicalisation et le désengagement. Le terme de désengagement correspond à un objectif de renoncement à la violence distinct d’un objectif de déradicalisation qui impliquerait une modification des convictions et de la façon de penser de la personne . C’est l’objectif principal des différentes actions expérimentées et menées au cours de ces deux dernières années et celles prolongées par le PNPR. Des actions qui visent deux grands types de public : les enfants de retour de zone de conflit irako-syrienne et les détenus radicalisés.
La prise en charge des personnes radicalisées sous main de justice
Après les attentats survenus en janvier 2015, la prise en charge de la radicalisation s’est imposée comme l’un des principaux axes de la politique pénale et pénitentiaire conduite par le Gouvernement . Le milieu carcéral constitue l’un des vecteurs de la diffusion d’idées radicales avec l’augmentation du nombre d’individus incarcérés pour des infractions terroristes en lien avec l’islam radical. Fin mars 2019, on comptait 517 personnes incarcérées pour des faits de terrorisme et environ 1000 personnes poursuivies ou condamnées pour des faits de droit commun mais repérées comme radicalisées. Aussi, le ministère de la Justice a initié plusieurs programmes, en milieu ouvert et en milieu fermé, afin de d’apporter des réponses plurielles à ce phénomène . Deux étapes sont menées :
- l’évaluation des personnes détenues pour des faits de terrorisme avec les dispositifs d’évaluation de la radicalisation dans les Quartiers d’évaluation de la radicalisation (QER) où les détenus passent 4 mois et les évaluations par les SPIP en milieu ouvert
Sept QER sont désormais ouverts (Fresnes, Osnay, Fleury-Merogis, 2 à Vendin-le-Vieil …) dont un à la prison des femmes à Rennes.
- l’affectation de ces détenus dans des structures correspondantes à leur évaluation de prise en charge la plus adaptée, tels que :
- les 79 établissements ciblés qui développent des programmes de prévention de la radicalisation violente (PPRV),
- les Quartiers de Prise en charge de la Radicalisation (QPR) au nombre de 2 en mars 2019 (Lille-Annoeullin et Condé-sur Sarthe) et les prochains en cours de réalisation en province et à Paris (La Santé),
- les Quartiers d’isolement (QI) en milieu fermé,
- Soit à terme 450 places étanches en QER, QPR et en QI.De plus, une prise en charge individualisée est mise en place dans 4 centres dont 2 d’ores et déjà ouverts à Paris et Marseille. Deux centres supplémentaires ouvriront en 2019 à Lyon et Lille, soit 110 places à terme.
Les mineurs de retour de zones d’opérations de groupements terroristes (MRZOGT) : sécuriser dans la durée leur prise en charge
La France est l’un des États comptant le plus grand nombre en Europe de ressortissants partis dans les territoires de regroupements terroristes (notamment d’Irak et de Syrie) . Par suite, la France est l’un de ceux ayant le plus grand nombre d’enfants à prendre en charge à leur retour. Le gouvernement a eu très tôt la volonté de mettre en place un dispositif d’accueil adapté au vécu de ces enfants. Ainsi, une prise en charge globale et interinstitutionnelle a été construite à partir de 2017, à la suite du retour de familles depuis la zone irako-syrienne.
Aussi le choix des autorités françaises a été de construire un dispositif spécifique intersectoriel s’appuyant fortement sur le droit commun de la protection de l’enfance. En mars 2017 à l’issue d’une concertation interministérielle, la première instruction est signée par le Premier ministre, organisant l’accompagnement des enfants revenant de la zone de guerre irako syrienne à leur retour en France. Celle-ci est remplacée, le 23 février 2018, par une seconde instruction permettant de mobiliser l’ensemble des services de l’État autour de la prise en charge de tous les mineurs ayant séjourné sur une zone d’opérations de groupements terroristes. Récemment une troisième instruction en date du 21 avril 2022 signée par le Premier ministre est venue renforcer l’ensemble du dispositif en particulier les mesures permettant une meilleure coordination des acteurs. Elle vient également entériner les pratiques judiciaires et l’expérience des territoires ayant eu à accueillir les premiers mineurs.
Ce dispositif spécifique a également été rendu nécessaire en raison du nombre important d’acteurs impliqués dans les prises en charge (magistrats, médecins, éducateurs, préfectures, policiers, gendarmes, ARS, psychologues etc..).
Depuis, un décret d’avril 2023 autorise le ministre de l’intérieur à créer un traitement de données à caractère personnel dénommé « Mineurs de retour de zones d’opérations de groupements terroristes » ayant pour finalité de permettre une meilleure coordination des services compétents en matière de prise en charge administrative, judiciaire, médicale et socio-éducative des mineurs de retour de zones d’opérations de groupements terroristes, en vue d’assurer leur protection et de prévenir leur engagement dans un processus de délinquance ou de radicalisation. Il définit la finalité de ce traitement, la nature et la durée de conservation des données enregistrées, les catégories de personnes y ayant accès ou en étant destinataires. Il précise également les modalités de traçabilité des opérations de traitement et d’exercice des droits des personnes concernées.
Livret d’information à destination des personnes concernées par l’application MRZOGT
Version FALC du livret d’information à destination des personnes concernées par l’application MRZOGT